5. Le retour de l’épée

Elle gravit les marches une à une, dans la nuit. Sa chevelure brune inonde son visage et dissimule ses traits, au gré du vent qui la soulève. Elle tient fermement sa longue robe blanche pour mieux franchir les blocs de pierre qui conduisent en haut de la tour en ruine. Une odeur de terre se mêle aux effluves de la forêt humide. La douleur d’un amour perdu est son seul guide. Faut-il s’approcher du ciel obscurci par des nuages immobiles pour y trouver un remède ? Faut-il chercher à l’horizon le signe d’un espoir ou faire entendre son cri pour le rappeler à ses côtés ? Arrivée au sommet, elle hurle l’absence de flamme, le vide, le manque. Elle ouvre ses bras, cherche son contact.

Il se tient enfin face à elle. Il lui tend les mains. Elle les saisit sans en ressentir la chaleur bienfaisante. Par contraste, ses propres mains lui semblent douloureusement glacées. Ses larmes lui font perdre la vue. Elle tourne sur elle-même, avec lui, et chante : reviens-moi, reviens-moi ! Telle une incantation, elle recommence encore et encore. 

Mais malgré ses efforts et ses tentatives, il ne parvient pas à la prendre dans ses bras. Il lui répond, au loin, le même chant, comme un écho fuyant. Puis le chant s’arrête, elle est seule, mais détentrice d’une force nouvelle. Sa robe blanche a disparu. Elle est maintenant vêtue d’une solide tenue de cuir noir, celle d’une combattante. Elle a, fixée dans son dos, une lance surmontée d’une longue lame tranchante. A ses pieds repose une lourde épée, qu’elle soulève et place à sa ceinture. Elle descend les marches, ouvre la porte et sort de la tour.

Un vieil homme l’attend à l’extérieur. Elle lui dit : « La cérémonie s’est bien passée. ». Elle lui donne l’épée. Il la regarde, le visage éclairé par l’épée rayonnante et lui répond : « La voici donc. Tout peut commencer. »